Cette fois-ci, je ne vous parlerai pas du travail de thanatologue. Non, je vous parlerai de moi, de ma courte histoire de célébrante funéraire, en mémoire d’Amélie.
Amélie 1980-2020
40 ans, c’est bien jeune pour partir. Aujourd’hui est un jour de fête pour certain, mais aussi un douloureux souvenir pour d’autres. C’est le premier anniversaire du décès de ma chère cousine Amélie, soit aujourd’hui le 1er juillet.
Ma cousine et moi avions plusieurs points en commun, entre autres, une passion pour l’entreprenariat; c’était sa profession. Depuis le début de cette belle aventure qu’est Services funéraires Alterna et même avant, elle est présente dans mes pensées. Elle m’accompagne dans ce projet d’entreprise, comme un mentor qui m’observe, m’encourage et me guide.
Un petit bout de notre histoire
J’ai envie de vous raconter de quelle façon j’ai commencé à animer des cérémonies funéraires et ce qui m’anime quand j’écoute l’histoire des gens qui nous ont quitté. Animer un hommage à la vie, ça peut vous sembler à première vue triste et morbide. Comment puis-je bien trouver un brin de gratitude dans ce nouveau métier que j’apprends à apprivoiser? Disons que je ne suis pas encore tout à fait immunisée par la montée des émotions en moi, mais j’y travaille. J’y trouve une dose incroyable d’amour et d’authenticité. C’est l’occasion d’un partage de souvenirs qui resteront à jamais gravés dans la mémoire des endeuillés.
Tout a commencé quand j’ai su que ma cousine Amélie, que je ne voyais pas assez souvent à mon goût, n’arrivait plus à combattre le cancer qui l’affligeait et qu’elle nous quitterait dans les prochaines semaines. C’était en juin 2020. Combien de fois on avait remis un souper de cousines dans le Vieux Québec, une visite à l’improviste, ou une conversation pour se donner les dernières nouvelles. Ça vous rappelle quelque chose? On fait tous ça… on est tellement occupés.
Dans les dernières semaines de sa vie, même si j’avais voulu, elle se fatiguait rapidement, et ne pouvait pas recevoir beaucoup de visite. Elle trouvait épuisant émotivement de rencontrer les gens qu’elle aimait, en sachant très bien qu’à chaque fois, c’était la dernière. Je me contentais d’avoir des nouvelles par sa sœur ainée, qui l’a hébergé pour ses derniers moments. Peut-être avez-vous déjà accompagné un proche dans ce genre de circonstances et que vous comprenez la situation.
Ce qui devait arriver arriva. Elle nous a quitté sans que je n’aie eu la chance de lui dire aurevoir de vive voix. Je me suis excusée à elle, par la pensée évidemment, de ne pas être allée la voir avant. Ce qui est étrange, c’est que je l’ai entendue me dire clairement avec un grand sourire et son petit rire légendaire ‘’C’pas grave’’! Ça m’a semblé tellement réel. Elle avait déjà des plans pour moi.
Pendant ce temps notre projet d’entreprise
En parallèle, moi et Sébastien étions à fond dans le pré démarrage de notre projet de salon funéraire. Nous venions de signer notre bail commercial et étions vraiment emballés de notre projet d’entreprise. Je ne savais pas trop quel serait mon rôle encore, mais je savais que j’aimais animer les événements pour l’avoir déjà fait à l’occasion dans mon emploi en développement économique. Écouter les gens et aller à leur rencontre, je le fais déjà dans un tout autre contexte, où les gens me racontent leur rêve de développer leur propre entreprise.
Je me suis donc inscrite à une formation de célébrante funéraire puisque ça me parlait beaucoup. Chose certaine, je n’avais pas envie de jouer les curés, ou de placer le nom du défunt dans des cases en répétant les mêmes histoires. Je voulais faire les choses autrement. Raconter une histoire bien à eux, afin d’apaiser pour un moment, la peine causée par leur départ.
La première fois
Les semaines ont passé. En août, le projet d’entreprise avançait bien, mais les funérailles d’Amélie n’avaient pas encore eu lieu en raison de la pandémie. Un bel après-midi, j’ai reçu un appel qui allait bouleverser carrément ma vie, de la part de ma cousine Esther, la grande sœur d’Amélie. Ma tante Jeannot, leur mère, avait vu passer ‘’par hasard’’ un de mes commentaires sur mon fil d’actualité Facebook, mentionnant que j’allais bientôt devenir célébrante funéraire. Me connaissant déjà un certain talent oratoire, elle m’a demandé si j’accepterais d’animer la cérémonie en l’honneur de ma cousine. Des larmes discrètes ont commencé à couler sur mes joues; je ne pouvais qu’accepter de le faire, me sentant simultanément sauter dans une sorte de vide rassurant. J’ai tout de suite compris que c’était ça qu’elle planifiait en remplacement de tous ces rendez-vous manqués.
Après une magnifique rencontre avec ses amies proches et sa famille, nous avons ensemble réussi à créer une cérémonie qui lui ressemblait vraiment. J’ai réappris à la connaitre à travers ces échanges, à écouter les nombreux témoignages des gens qui l’aimaient, bien plus que ce dont nous aurions pu discuter autour d’un bon repas. Étrangement, j’avais la sensation d’avoir pu un peu rattraper le temps perdu.
J’ai ressenti une dose immense de gratitude d’avoir eu l’honneur de participer à ses funérailles, cet hommage à sa vie, à l’image d’Amélie, la voyageuse, passionnée de la vie. J’ai eu à ce moment la certitude que j’allais m’y plaire. Malgré la peine ressentie par les gens, contribuer à faire de ce dernier aurevoir un moment rempli d’émotions, autant dans la tristesse que dans la joie, gravant à tout jamais de précieux souvenirs dans les cœurs.
Être à la hauteur pour la suite
Je vous avoue que j’ai eu peur de ne pas être à la hauteur lors des mandats qui m’ont été confiés par la suite. Saurais-je rendre une cérémonie personnalisée avec de purs inconnus avec qui je n’ai eu que quelques heures pour connecter? Mais à chaque fois, je fais des rencontres humaines extraordinaires. Peu importe la vie que les gens ont vécue, ils sont uniques, ils ont leur propre histoire, leurs moments forts à eux, sans jugements. Et c’est ça que je m’efforce de mettre en lumière à chaque cérémonie, en faisant des proches du défunt des complices de la réussite de ce dernier aurevoir qui est une étape importante du deuil.
Démarrer une entreprise, ce n’est pas tous les jours facile. Comme dans la vie, il y a des hauts et des bas. Amélie ma conseillère en entreprenariat m’a fait confiance au premier jour et aura toujours sa place dans mon équipe de conseillers.
Préparer une cérémonie pour les familles endeuillées est pour moi un privilège. Être célébrante, c’est raconter une histoire, soutenir les endeuillés, rassembler les gens autour des souvenirs qu’ils ont partagé pour que chacun se sente moins seul; c’est une magnifique mission.